Mam ou la survie par le plastique

Publié le par Guillaume

Un peu partout en ville, des personnes en âge de la retraite, sillonnent la ville, fouinant les poubelles à la recherche de bouteilles de plastique. De ses petites mains, les entreprises locales du recyclage tirent un bénéfice qui inquiète ses concurrentes occidentales.

 

Il est difficile de lui donner un âge. Une vie de labeur d’abord dans les champs puis à la ville comme ouvrière lui a creusé prématurément les sillons de la vieillesse sur son visage. A 60 ans, elle en paraît 70. Ses haillons de travail, sales, la vieillissant un peu plus. Mam (je n’ai pas saisi son nom, alors je l’appelle comme cela) fait la tournée des poubelles de l’université. Sur ses épaules fatiguées mais encore endurantes, elle trimballe un énorme sac débordant de bouteilles de plastique. Mam ne peut plus travailler à l’usine. En France, elle serait une retraitée, jouissant d’une pension. Bien qu’habitant avec ses enfants, le revenu de ces derniers ne se révèle pas suffisant pour manger à satiété. Alors, Mam s’est mise à récupérer les bouteilles en plastique et les revend à des petits grossistes au nord-ouest de la ville, qui les revendent aux usines de recyclage situées dans la périphérie de la ville. Cela sert d’appoint pour envoyer son petit fils à l’école. Elle aimerait qu’il aille au lycée et à l’université. Elle travaille pour son avenir et changer ainsi le cours de l’histoire de la famille. Tous les jours, sans relâche, tant que la santé ne lui fait pas défaut, elle sillonne cette partie de la ville. Pour autant elle garde le sourire. Elle a connu les périodes troubles durant laquelle la famine sévissait dans les campagnes lors du grand bond en avant sous Mao. Elle a connu les expropriations, la mort de son mari. L’avenir ne peut-être que meilleur. Mam en est sûr. Cet optimisme vous frappe de plein fouet. Des Mams, on en croise un peu partout dans les quartiers plus aisés de la ville. Certains récupèrent le carton, d’autre le verre. Des hommes plus jeunes font le tour des recycleurs de poubelles et acheminent sur des tricycles, parfois motorisés, leur récolte.

De ses petites mains, dont le coût se révèle peu élevé, les entreprises chinoises de retraitement des déchets tirent un avantage qui fait peur à ces concurrentes occidentales sur le marché mondial. En 2004, la filière française de recyclage des bouteilles de plastiques s’était même émue de cette concurrence faussée. Doublées par les businessmen chinois qui surenchérissaient le prix auprès des déchetteries, les entreprises du secteur demandaient aux élus d’adopter des garanties législatives et commerciales. Ce fut fait, tant la Chine fait peur. Mais dans cette guerre économique, les chinois n’ont pas dit encore leur dernier mot. D’autres batailles sont à attendre. Certes moins visibles que le textile, où l’âpreté des combats fait de nombreux dégâts en Europe et aux Etats-Unis.

Publié dans géopolitique

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